HISTOIRE
En tant que Bagirov, Alyosha aurait dû devenir un membre émérite de la mafia russo-ukrainienne new-yorkaise. Ou mourir d’une balle dans la tête avant d’avoir atteint la trentaine… Un avenir peu reluisant duquel le sauve sa mère en négociant leur liberté contre la vie de son mari. Et ce n’est pas Ali qui ira le lui reprocher. Il n’avait que 2 ans et quelques à l’époque, n’a donc pas vraiment souvenir de tout ça à part de vagues réminiscences des cauchemars qu’il faisait quand il était gamin.
Alyosha se souvient de Portland, en revanche. Du petit appartement où il grandit entre l’automne 2004 et 2008, entouré de sa mère et de Yuri, l’homme dont il porte maintenant le nom. Il a une enfance heureuse là-bas, comme à Los Angeles, où la famille finit par déménager lorsque Yael termine ses études de droit et y obtient son premier poste. Ce n’est qu’en 2016 que les choses se bousculent un peu pour lui : qu’il prend pleinement conscience d’où il vient. Ses parents n’ont jamais cherché à lui cacher la vérité pourtant ; même s’il appelle Yuri plus souvent
papa que par son prénom, il sait que ce n’est pas son père biologique, que sa mère fut mariée de force, avant, à un sale type qui lui faisait du mal, un mafioso que peu de gens ont dû pleurer quand il s’est fait descendre. Il
sait, mais l’adolescence lui donne la maturité nécessaire pour
comprendre toute l’horreur que cela sous-entend.
Cette année 2016, sa mère, qui travaille alors pour le District Attorney de LA, obtient une petite notoriété en démantelant un réseau de traite des enfants. Elle fait la une de certains journaux, on s’intéresse à elle, à son histoire particulière, etc., et Alyosha entend soudain dire toutes sortes de choses, des plus élogieuses aux plus sordides en passant par la bêtise et la cruauté de certains. Des camarades de classe, notamment, trouvent très drôle de lui montrer des photos érotiques qui circulent sur le net et datent de l’époque où sa mère était prisonnière de la mafia… Cette période est très difficile à vivre pour Ali, qui réalise être le fruit d'un viol et d'années de souffrances. Même si le sentiment ne disparaîtra jamais, ni la réalité de son passé, il parvient toutefois à surmonter le plus dur grâce au soutien de ses proches et aux longues discussions que ses parents prennent le temps d’avoir avec lui.
La naissance de sa sœur Tali, en 2018, l’aide beaucoup à faire la part des choses. Ali veut le meilleur pour elle et se concentre alors sur le fait de participer à améliorer le monde dans lequel elle est née plutôt que de se morfondre sur ses aspects les plus vils. Bizarrement, c’est aussi peu après cela que sa mère commence à s’absenter de plus en plus de leur vie. Elle et Yuri ont beau sauver la face comme ils peuvent et prétendre que rien n’a vraiment changé, Ali n’est pas dupe. Se doute qu'ils cachent quelque chose et il n'aime pas ça.